Vieillir demande de faire son deuil, d’abandonner et d’accepter de ne pas en faire autant que dans notre jeunesse. Bien vieillir est donc un art qui demande de la sagesse et du lâcher-prise.

 

Dans cette série d’articles, je vais présenter le témoignage de personnes âgées au parcours inspirant. Des seniors qui « surfent » en équilibre sur les vagues de la vie. L’objectif serait de rendre hommage aux aînés et de donner une perspective positive du vieillissement.

 

Pour mon premier article de cette série, j’ai choisi d’interviewer ma mère, Sylvie, une combattante dans l’âme mais aussi une personne sage.

 

Je vais parler de son parcours atypique, des obstacles qu’elle a traversés, de son évolution et de ce dont elle est la plus fière. Je parlerai également de ses valeurs ainsi que de ses occupations et de ce qu’elle fait pour rester en bonne santé.

 

Sans plus attendre, voici Sylvie.


Son parcours atypique

 

Ma mère, qui a 73 ans, est une femme au parcours atypique. Elle a d’abord complété un baccalauréat ès arts à l’Université McGill, puis elle a fait de la pêche au saumon dans le nord de la Colombie-Britannique, près de l’Alaska, avec son premier mari (mon père). Elle a eu son premier enfant (moi), après quoi elle a décidé d’arrêter la pêche au saumon. Plus tard, elle s’est séparée de mon père.

 

Comme son baccalauréat ès arts ne lui donnait pas d’attestation d’enseignement et ne lui permettait pas de gagner sa vie, elle a entrepris un baccalauréat en enseignement du français langue seconde à l’UQAM. C’est là qu’elle a rencontré son deuxième mari avec qui elle a eu un deuxième enfant. Actuellement, elle est séparée de son deuxième mari.

 

Par la suite, Sylvie a travaillé près de 25 ans en francisation auprès d’adultes pour le ministère de l’immigration. Depuis 2016, elle est à la retraite mais elle effectue des remplacements occasionnels.

Ma mère décrit ainsi son parcours : « J’ai jonglé avec deux enfants de 13 ans d’écart, avec deux pères différents, et je travaillais en même temps, c’était du rock and roll. Disons que ma vie n’a pas été un lit de roses ».

 

Contrairement à ses sœurs et à certaines de ses amies, qui se sont mariées, ont une maison et ont pratiquement toujours vécu au même endroit, ma mère s’est séparée deux fois, a loué et a déménagé plusieurs fois.

 

« Beaucoup de gens autour de moi font un voyage avec leur mari, achètent une maison en banlieue, achètent deux voitures, mais je n’ai jamais suivi la foule. Dernièrement, j’ai lu quelque chose qui m’a fait réfléchir. Dans l’article, le journaliste a déclaré que dans notre culture, l’achat d’une maison est un signe de réussite sociale. Si vous n’avez pas acheté une maison, c’est comme si vous n’aviez pas réussi socialement. J’ai toujours été contre.

 

Sylvie n’aime pas le capitalisme et les valeurs matérialistes « parce que quand on est dans une zone de confort, on est moins conscient des injustices, qu’il y a des gens par exemple qui cherchent un logement ».

 

D’autre part, ma mère a fait le choix de vivre sans mari, mais elle a un solide réseau d’amis.

 

Les obstacles qu’elle a rencontrés dans sa vie

 

Dans sa vie, ma mère a rencontré certains obstacles. Ainsi, son jeune frère s’est suicidé à l’âge de 21 ans, et six mois après que son père est décédé d’un cancer du rein. D’un autre côté, il y a le fait que sa fille aînée (moi) est tombée malade mentale en 2011. Cet événement a été très douloureux et continue de l’être aujourd’hui.

 

Sylvie a également vécu une relation ratée avec son second mari : « Je pense que j’avais tort, je suis restée avec lui mais je n’en avais pas envie, j’avais l’impression qu’il n’était pas le bon mari, je me forcerais à être avec lui, mais je n’étais pas bien ». Évidemment, la séparation avec son premier mari a également été difficile mais « ils étaient à des endroits différents de leur vie ».

 

Ma mère est fière d’avoir pu s’en sortir malgré les embûches et malgré cela, sa vie n’a pas été facile.


Son évolution

 

Ma mère considère qu’elle a beaucoup évolué. Elle n’est plus la même personne qu’elle était quand elle était jeune. Avant, elle était plus égocentrique et elle trouve qu’elle est devenue plus sage en vieillissant : « Avant, je cherchais toujours la bagarre. Mais il faut choisir ses combats, accepter que les choses ne se passent pas toujours comme on le souhaite.

 

Sylvie est plus compatissante envers elle-même : « J’ai fait une erreur de conduite plus tôt. J’ai voulu tourner à gauche quand je n’avais pas la droite et toutes les voitures derrière moi ont commencé à klaxonner. Avant, j’aurais été plein de honte. Maintenant, je me dis que c’est bien de faire des erreurs et je me pardonne.

 

Tout au long de sa vie, ma mère a beaucoup travaillé sur elle-même « parce que je n’ai pas envie de mal vieillir ». Ainsi, depuis quelques années, elle pratique une méditation d’inspiration bouddhiste, ce qui l’aide avec ses émotions et son comportement.

Depuis l’âge de 40 ans, Sylvie écrit dans son journal pour se sentir mieux et travailler sur elle-même : « J’écris beaucoup quand je suis très bouleversée, je suis une personne très émotive, parfois je dois m’arrêter et me calmer. Quand j’écris, cela m’aide à prendre mes distances.

 

Dans le contexte de ma maladie mentale, ma mère a reçu le soutien d’une intervenante psychosociale : « Je l’appelle et elle m’aide, je me sens mieux après avoir parlé avec elle. Elle m’aide dans ma relation avec mes enfants et cela se reflète positivement sur mes autres relations dans ma vie.

 

Ce dont elle est la plus fière

 

Sylvie est très fière de ses filles. Même s’ils ont vécu de grands défis dans leur vie et qu’ils ont un parcours atypique, ils s’en sortent très bien.

 

« Quand on est dans un moule, on suit un parcours que la société nous impose. Nous vivons selon des règles établies, sans nous poser de questions. Nous achetons une maison, deux voitures, et nous nous entourons de confort et nous devenons de plus en plus aliénés des gens qui souffrent et qui doivent se battre. Quand on a un parcours atypique, on vit en fonction de ses valeurs personnelles et on se connaît mieux.

 

Ses valeurs

 

La justice sociale et l’environnement sont des valeurs importantes pour ma mère. Elle n’aime pas les valeurs individuelles : « Je fais partie du comité catalyseur à Lasalle (dont le but est de développer la vie en communauté) parce que la communauté et la solidarité entre voisins sont importantes pour moi. » Sylvie prône la solidarité, la coopération et l’entraide. Selon elle, il est important de bien communiquer nos besoins et de ne pas avoir peur de demander de l’aide.


Ses occupations

 

Depuis qu’elle a pris sa retraite, ma mère a divisé sa vie en trois domaines : la créativité, la spiritualité et le plein air. Sur le plan créatif, elle a lancé une petite entreprise de bijoux en micro-macramé, qu’elle fabrique elle-même. Sur le plan spirituel, elle fréquente occasionnellement le centre de méditation bouddhiste de Rigpa. En ce qui concerne le plein air, Sylvie intègre la randonnée pédestre dans son quotidien.

 

Pour gagner de l’argent supplémentaire, elle s’est rendue disponible pendant la semaine pour remplacer les enseignants. Comme elle a moins d’énergie qu’avant et que son travail est exigeant, elle prévoit réduire progressivement ses journées de disponibilité.

 

Le week-end, Sylvie s’inscrit à un cours de pilates et à un cours de yoga. Elle s’occupe également des courses, de la cuisine, du ménage et s’occupe de ses plantes (elle a également un fort intérêt pour les arbres et les plantes).

 

Ma mère est satisfaite de sa routine mais elle trouve qu’elle en fait parfois beaucoup : « Peut-être que je me pousse parce qu’il y a un vide existentiel en moi ».

 

 

Ce qu’elle fait pour rester en bonne santé

 

Dans l’ensemble, Sylvie a de bonnes habitudes de vie. Pour rester en bonne santé, elle mange bien, elle se lève tôt, elle fait de l’exercice et ne boit pratiquement pas d’alcool.

 

 

Vieillissement

 

Ma mère a de bonnes capacités cognitives, mais elle remarque qu’avec l’âge, elle oublie davantage les choses. Sur le plan physique, elle est plus fatiguée qu’avant et elle récupère moins vite. Sur le plan mental, elle se sent plus anxieuse qu’avant et subit moins de stress.

 

Ses craintes face au vieillissement sont : la mort, la peur de ne pas être autonome et d’avoir besoin d’aide, de ne pas pouvoir vivre seule et d’être placée en CHSLD. Pour surmonter ses peurs, son refuge est la nature car elle lui permet d’être dans le présent.


Ses occupations

 

Depuis qu’elle a pris sa retraite, ma mère a divisé sa vie en trois domaines : la créativité, la spiritualité et le plein air. Sur le plan créatif, elle a lancé une petite entreprise de bijoux en micro-macramé, qu’elle fabrique elle-même. Sur le plan spirituel, elle fréquente occasionnellement le centre de méditation bouddhiste de Rigpa. En ce qui concerne le plein air, Sylvie intègre la randonnée pédestre dans son quotidien.

 

Pour gagner de l’argent supplémentaire, elle s’est rendue disponible pendant la semaine pour remplacer les enseignants. Comme elle a moins d’énergie qu’avant et que son travail est exigeant, elle prévoit réduire progressivement ses journées de disponibilité.

 

Le week-end, Sylvie s’inscrit à un cours de pilates et à un cours de yoga. Elle s’occupe également des courses, de la cuisine, du ménage et s’occupe de ses plantes (elle a également un fort intérêt pour les arbres et les plantes).

 

Ma mère est satisfaite de sa routine mais elle trouve qu’elle en fait parfois beaucoup : « Peut-être que je me pousse parce qu’il y a un vide existentiel en moi ».

 

 

Ce qu’elle fait pour rester en bonne santé

 

Dans l’ensemble, Sylvie a de bonnes habitudes de vie. Pour rester en bonne santé, elle mange bien, elle se lève tôt, elle fait de l’exercice et ne boit pratiquement pas d’alcool.

 

Vieillissement

 

Ma mère a de bonnes capacités cognitives, mais elle remarque qu’avec l’âge, elle oublie davantage les choses. Sur le plan physique, elle est plus fatiguée qu’avant et elle récupère moins vite. Sur le plan mental, elle se sent plus anxieuse qu’avant et subit moins de stress.

 

Ses craintes face au vieillissement sont : la mort, la peur de ne pas être autonome et d’avoir besoin d’aide, de ne pas pouvoir vivre seule et d’être placée en CHSLD. Pour surmonter ses peurs, son refuge est la nature car elle lui permet d’être dans le présent.

 

Concernant sa peur de la mort, elle en parle au centre de méditation bouddhiste de Rigpa. Elle a déjà fait des méditations sur la mort et elle a aussi le livre tibétain de la vie et de la mort. Pour diminuer son angoisse d’affronter la mort, Sylvie a déjà fait ses préarrangements funéraires ; Il ne lui reste plus que son urne funéraire à fabriquer.

 

 

Pourquoi est-ce que je pense que ma mère est une aînée avec un parcours inspirant ?

 

Ma mère est une aînée avec un parcours inspirant parce qu’elle a réussi à garder la tête hors de l’eau malgré toutes les difficultés qu’elle a traversées. Elle est dure face aux obstacles de la vie et elle fait appel à la nature et au soutien social pour l’aider. Elle trouve toujours des moyens de surmonter ses peurs. Ma mère est une femme qui travaille beaucoup sur elle-même et elle veut constamment s’améliorer.

 

Ce qui me frappe, c’est à quel point sa vie est équilibrée (créativité, spiritualité, plein air). Elle fait également plusieurs actions pour rester en bonne santé (méditation, nutrition, exercice).

 

 

Son parcours atypique l’a rendue plus forte et plus créative. Comme elle ne « rentre pas dans le moule », ma mère, libre penseuse, vit selon ses convictions et ses valeurs profondes.

 

 

Ma mère : une personne immensément importante dans ma vie

 

Avec mon père, ma mère était et est toujours la personne la plus importante dans ma vie. Elle a pris soin de moi avec bienveillance depuis ma naissance jusqu’à aujourd’hui. Elle s’est occupée de mon éducation et de mon développement personnel. Elle m’a offert un bon coaching et une oreille attentive lorsque je rencontrais des difficultés. Ma mère était toujours présente dans les moments de transition et les moments de doute. Elle était toujours soucieuse de faire ce qu’il fallait.

 

Avec l’arrivée de la bipolarité dans ma vie, je me suis encore plus rapprochée de ma mère car j’avais besoin d’un peu de soutien dans l’accomplissement de mes activités quotidiennes. Ma mère m’a aidé à me remettre sur pied après chaque épisode de ma maladie. Elle m’a encouragée dans mes projets, m’a aidée à garder les pieds sur terre. Elle a grandement contribué à mon rétablissement. Elle s’est même impliquée dans la cause de la santé mentale pour contrer la stigmatisation. Ma mère a fréquenté un organisme qui offre du soutien aux membres de la famille de personnes ayant des problèmes de santé mentale. Cet organisme l’aide à prendre soin d’elle tout en m’aidant.

 

Tout compte fait, ma mère est immensément importante dans ma vie, car malgré nos défauts respectifs et malgré nos querelles occasionnelles, nous restons unis. Pour moi, ma mère est un modèle de résilience, d’équilibre et d’affirmation de soi.

05 septembre 2023 — Jeanna Roche